Que savez-vous du marché de la construction neuve au Québec?
Qu’il soit question de logements locatifs ou d’habitations neuves, la pénurie de logements touche l’ensemble du marché immobilier. Pour y voir plus clair, Guillaume Houle, responsable des affaires publiques à l’Association de la construction du Québec brosse le portrait de la situation au Québec dans le 18e épisode du balado L’immobilier en mouvement de l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec.
Portrait du marché de la construction au Québec en 2023
En 2023, entre 35 000 et 38 000 unités devaient être mises en chantier, ce qui est peu en comparaison aux années précédentes : « Pour donner un ordre de grandeur, on a construit environ 50 000 unités d’habitation en moyenne par année au cours des 10 dernières années », explique le responsable des affaires publiques. Le taux de mise en chantier de 2023 est ainsi le plus bas enregistré depuis les deux dernières décennies.
Impact de l’inflation
La remontée de l’inflation observée en 2023 a entraîné des répercussions sur le marché de la construction au Québec. La hausse des taux d’intérêt et la capacité d’emprunt des constructeurs ont joué un rôle majeur : « Imaginez des entrepreneurs qui doivent emprunter des millions de dollars pour lever de terre des projets, acheter les matériaux et payer la main-d’œuvre d’ici à ce que le projet soit terminé et qu’ils puissent le rentabiliser », illustre Guillaume Houle.
De plus, le
responsable des affaires publiques explique que les entrepreneurs doivent
emprunter à des taux d’intérêt qui peuvent atteindre 6 %, 9 %, voire
10 %, ce qui représente des sommes colossales : « On attaque non
seulement la viabilité d’un projet, mais aussi l’abordabilité des unités qui
seront construites », précise le spécialiste.
En outre, les marges
bénéficiaires demandées par les institutions financières ne sont plus réalistes.
Auparavant, celles-ci se situaient entre 6 % et 12 %; aujourd’hui,
elles sont de 4 % à 8 %. Ce revirement de situation a un impact
direct sur les garanties financières qui sont maintenant exigées de la part des
banques.
Accès à la propriété pour les familles
Cela signifie-t-il
que les familles pourront difficilement accéder à la propriété? Fort
probablement. « Les contribuables ont atteint une capacité de payer et les
recherches de la SCHL sont assez éloquentes sur le sujet. L’abordabilité des
unités est attaquée de plein fouet. Et parce que l’on construit moins, les
unités existantes se vendent à des prix plus élevés », soutient Guillaume
Houle.
Comme les nouvelles
constructions se font à des coûts exorbitants, seuls les projets privés de
grande envergure s’élevant parfois à des millions de dollars par unité lèvent
de terre. « Les constructeurs se rendent comptent qu’ils ont atteint
leur limite parce qu’ils ne doivent pas uniquement servir les clientèles mieux
nanties, mais également celles de la classe moyenne […] qui aimeraient
devenir propriétaire, mais qui ne peuvent y parvenir actuellement », défend
l’expert.
Pour Guillaume Houle,
il est essentiel de bâtir des habitations neuves, toutes catégories
confondues : des unités luxueuses, des maisons pour la classe moyenne et des
logements sociaux. À cet égard, le gouvernement du Québec a récemment annoncé
un budget de 1,8 milliard de dollars pour la construction d’environ
8 000 logements sociaux. De son côté, la SCHL croit que la mise en
chantier de 860 000 unités supplémentaires – par rapport à ce qui est
prévu d’ici 2030 – sera nécessaire pour résoudre la situation.
À quoi s’attendre au cours des prochaines années?
Questionné par
rapport à la demande d’habitations au cours des prochaines années, Guillaume
Houle entrevoit deux volets à la suite des choses. Le premier concerne la
hausse de productivité au sein de l’industrie en vue de réduire les coûts de
construction : « Quand on regarde la lourdeur et la rigidité
réglementaires au Québec dans l’exercice des métiers de la construction, on
constate un manque de polyvalence », dépeint le porte-parole de l’ACQ.
De l’autre côté, l’aspect financier occupe un rôle important. Afin de réguler le marché, le gouvernement du Canada a déployé une mesure temporaire qui suspend la TPS sur la construction d’habitations locatives. Selon Guillaume Houle, le gouvernement du Québec et les institutions financières pourraient mettre en œuvre des actions semblables, dès 2024, en offrant des taux d’intérêt préférentiels, par exemple.
Plusieurs actions peuvent donc être mises en place pour stimuler le marché de la construction neuve et atténuer la crise du logement qui marque l’actualité québécoise.
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